Emission du 13 janvier 2006 - Diner au Caracoya

Publié le par Sam

Dimanche 8 janvier…. Je crois que j’ai raté ma vocation, les amis, j’aurais dû être guide gastronomique, mais il faut reconnaître que je ne suis pas très objectif car j’ai un petit faible pour ces petits restaus mythiques de centre ville, comme en comptent toutes les villes en Algérie… Charme désuet, cuisine simple, décoration hors du temps, ambiance inimitable, ces lieux sont autant de repères où j’ai mes habitudes, et où je passe régulièrement de merveilleux moments… L’une de mes cantines préférées s’appelle le Caracoya, l’un des rares restaurants du centre ville d’Alger où l’on peut manger à n’importe quelle heure, mais surtout, où l’on peut s’installer à l’extérieur…. Ça vous dit d’aller caracoyer un coup avec moi, eh bien, suivez-moi……

Le Caracoya, situé en plein centre ville, est indiqué par une toute petite enseigne. La grande porte du restaurant est close, il faut sonner, et c’est le maître d’hôtel, qui vous ouvre, avec un grand sourire… Une petite antichambre, avec un comptoir sur la droite pour déposer ses affaires, et sur la gauche un mur de bois avec de vieilles photos en noir et blanc de certains de nos artistes Seloua jeune, Hilmi, etc…Les murs sont en bois foncé, la carrelage gris noir, et les tentures sont rouges, la salle est d’ailleurs séparée par une tenture rouge, on ouvre la tenture, et là, on accède à une grande salle confortable, avec une cheminée au fond, toujours allumée en hivers où un bon feu de bois crépite… les tables sont grandes, et les fauteuils en skay rouge sont confortables, merveilleusement assortis au murs de bois foncé…. Sur la gauche de la salle, une immense baie vitrée, avec de lourds rideaux, donne sur la cour extérieure, vide en hiver, pleine en été, où les jours de soleil…. On y accède par le fond de la salle, et dès l’extérieur, en haut de l’escalier, un gros berger allemand vous accueille en aboyant, génial, non….. Le restaurant est en fait situé dans une ancienne école primaire, d’où la cour et le préau…. La cour est protégée des immeuble alentours par des canisses qqui forment un toit de fortune et sous les canisses, au dessus de chaque table, des ventilateurs, qui peuvent être actionnés en été, à la demande du client…. Etant donné qu’il fait un froid de canard, on décide de s’installer confortablement à l’intérieur, bien engoncé dans nos fauteuils et pas trop loin de la cheminée… la tablée est complète, nous sommes 5, le restau n’est pas trop bondé mais la plupart des tables sont occupées, par des habitués du lieu, généralement, et dont je fais partie, d’ailleurs…. On commande, le serveur nous présente de la lotte bien fraiche sur un plateau, on n’est pas intéressés, on décide de faire dans le trip carnivore, rognons grillés pour moi, filet et entrecôte pour les autres, accompagnés de légumes et de pommes frites, et jus de raisin de rigueur….Le serveur papote quelques minutes avac nous, il nous montre des photos de lui dans son village de kabylie, avec ses amis, fusil en main, car c’est un amateur de chasse, il n’en finit pas de nous parler des montagnes, j’en profite pour lui parler de notre périple à Yakouren ou la montagne est pleine de détritus, lui nous assure, que dans son coin, vers Maatkas, la montagne est propre et au vu des paysages qu’il nous montre, je n’ai qu’une seule envie c’est de me faire inviter... Bien évidemment, il me le propose, alors rendez-vous est pris avec lui et ses amis….Derrière nous, à une table, on reconnaît l’écrivain Rachid Boudjedra, une copine joue aux groupies, et elle y joue tellement bien, que lui et son copain décident de se joindre à nous et c’est reparti pour un papotage général, on cause, on discute, on se dispute, tout y passe, le conflit israélo-palestinien, les relations entre les pays du Maghreb, la mort de Sharon, les restaurants d’Alger, le Caracoya se vide de ses clients, et nous, on continue, on continue, on continue, à causer, causer, causer… On termine par des flans au caramel et des tartes au fraise maison, délicieuse, les serveurs commencent à éteindre les lumières, on vient juste de se rendre compte qu’il est une heure du matin et que le restaurant est désert… On paie l’addition, on se dirige vers le comptoir pour récupérer nos manteaux, mon serveur copain chasseur futur hôte nous salue, ainsi que la maître d’hotel qui nous ouvre la lourde porte, et nous voilà à l’extérieur…. La rue Didouche Mourad est déserte, une femme et son enfant ont disposé des cartons pour dormir, vision d’apocalyspse, encore un autre clochard, roulé en boule, un autre groupe de SDF ont fabriqué comme une maison avec des cartons, à même la rue, et ils s’entassent avec des couvertures, sentiment de révolte, d’impuissance, on distribue quelques pièces, l’air est doux, Alger est là, offerte à nous, avec la chaleur de son petit restaurant hors du temps, avec la dureté  de ses SDF abandonnés dans la rue dans l’indifférence générale, une Alger aimable, une Alger haissable, ce soir, moi, repus, je dormirai bien au chaud, dans mon lit, avec ma culpabilité à mes côtés, hanté par ces maisons de cartons à même le sol, à quelques mètres de chez moi…..

Publié dans alger-intime

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M
bonjour; je trouve le blog magnifique. Le premier qui allie un journal intime à des descriptions dignent de celles d'un grand écrivain.bon courage et salut.
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S
C'est fort possible, mais tu sais, apèrs un repas bien arrosé, je pense que je ne sentais plus le froid. ...A++
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K
Il faisait très froid à Alger ce soir là surtout à 1h du mat ...et forcément pas doux...Hic!!  
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K
Samir,<br /> T'as oublié un truc énorme...<br /> Il a plu le 8 janvier au soir jusqu'au 9 janvier...la veille de l'Aïd Demandes au SDF!<br />  <br />  
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I
Helloo!<br /> je passais tjr devant le caracoya, je regarder la jolie porte en bois, mais je c pas pk, je croyais que c t une boite de nuit lolll<br /> biz<br /> ciaou
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