Emission du 2 septembre 2005 - Mon portrait de la semaine - Hamdane, le chaouch

Publié le par Sam

A 23 h 30, c’est l’heure de ma rencontre de la semaine et comme toutes les semaines, je dresse le portrait d’une personne qui a croisé ma vie. Et toi, toi le gardien du temple, au milieu du couloir, assis sur ton bureau, toi le chaouch, j’ai passé deux heures en ta compagnie, ce matin là, à t’observer, et à te regarder vivre…..

Le long couloir, les chaises qui font salle d’attente, et toi, en face, assis à ton bureau….Un grand bureau avec un grand fauteuil. Le gobelet de café, le journal, et le registre fatigué, grand cahier à carreaux écossais…. Toi le chaouch, le gardien du temple, toi qui décide de qui entrera, qui attendra, qui n’attendra pas, qui pourra s’asseoir pas s’asseoir…. Les cheveux et la moustache grise, quelques dents qui font de la résistance, un pantalon noire, une chemise bleue élimée, et toi, assis dignement la tête bien droite, à lire ton journal et à boire ton café, concentré, lointain, nous assis en face, silencieux, à te regarder….. De temps en temps, on crie hamdane, d’un des bureaux, et toi tu te lèves, tu entres dans le dit bureau, tu disparais 5 minutes, et tu reviens, pour t’asseoir toujours aussi dignement sur ton bureau…. Un personne arrive, tu te redresses, l’interrogatoire que nous avons tous subi commence, oui, chkoune theouess, ehlech … La personne chuchote, se justifie, attend le verdict qui tombera comme un couperet : Djouz, on sent l’éclat de joie dans le regard de l’heureux élu, et l’envie chez ceux qui sont en face, comme moi, à attendre…..Oukhoud hna ouestenna, bienvenue au club….. Mechi hna rouh leddeuxième, abattement de la personne, qui commence à râler, et là, de ta voix de baryton, tu te mets à crier en expliquant que ce n’est pas de ta faute, qu’il n’a pas à te parler comme ça, tu prends les autres à témoin qui hochent la tête pour te soutenir en espérant une faveur de ta part, un retour d’ascenseur, et tu renvoies le malotrus qui a osé te braver, aussi rapidement qu’il est venu… Et puis effervescence dans le bureau d’en face, on crie hamdane, hamdane, tu pars en te dandinant légèrement pour accélérer le pas, sous le regard empli d’espoir de ceux qui attendent, cloués sur leur chaise…. Et tu réapparais, un sourire ravi aux lèvres, comme un missionnaire prêt à répandre le bien dans sa paroisse et d’une voix joyeuse, tu nous dit « dja el chef de service »… Frémissement sur les chaises, excitation, la longue attente va être terminée…. C’est enfin mon tour, je me dirige vers toi, le cœur battant, tu regardes le papier que je te tends longuement, tu hoches la tête, j’ai l’impression de repasser l’oral du bal et là, avec ton sourire laissant paraître tes dernières dent, le regard lumineux, tu dispense ta bonne parole et tu me dis… DJOUZ… J’ai envie de t’embrasser, de te sauter au coup, de danser avec toi et je cours vers le chef de service d’un pas décidé en caquant des talons vers le bureau du Chef de service… A la sortie, le même regard complice et tu me dis, ça y est fritha, je te répond oui, fritha, tu me dis el hamdoulleh, je me confonds en remerciements,  au pied de ton bureau au milieu du couloir et je ressors, ravi, heureux, victorieux, soulagé…. Merci Hamdane, roi des chaouch, grâce à toi, j’ai compris que le bonheur tient finalement à bien peu de choses…..

 

 

 

Publié dans alger-intime

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C
bonjour de France !<br /> j'aime bien ce portrait.<br /> clem.
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